À Berengeville-la-Campagne, nul besoin de remonter bien loin : le moindre chemin creux, les haies touffues et les cimes fruitières rappellent que, depuis des siècles, l’humain modèle la campagne. L’openfield normand – ce patchwork de champs ouverts entrecoupés de talus – s’inscrit dans une histoire paysanne très ancienne.
Les premières traces d’occupation agricole remontent à l’époque gallo-romaine (source : Persée, Revue du Nord), mais c’est vraiment au Moyen Âge que l’organisation du terroir prend forme : assolement triennal, rotation des cultures, exploitation des vergers pour le cidre dès le XVe siècle. Les plans cadastraux de 1812 témoignent, près d’ici, d’un maillage déjà dense de parcelles, modifiées petit à petit pour répondre aux besoins de chaque époque.
Au-delà des champs, l’unité du village s’incarne dans son cœur : l’église, le lavoir, la salle des fêtes et, jadis, son école. La vie rurale c’est d’abord une vie de proximité, où l’on se croise, se connaît, où l’entraide n’est pas un vain mot mais une réalité tissée au quotidien.
Les foires et marchés ponctuaient l'année, offrant une respiration bienvenue et une occasion de se jauger, négocier, partager. C’est là aussi que circulaient les nouvelles, les rumeurs… et la mémoire collective.
La vie rurale, c’est un chapelet de gestes et de traditions dont certaines subsistent, d’autres se sont effilochées, remplacées par d’autres rythmes. La fête du cidre, la tuaison du cochon et les veillées racontent pourtant encore aux plus jeunes ce que pouvait être « la vie d’avant ».
Si la ruralité a longtemps été synonyme d’autosuffisance, elle a aussi traversé tempêtes et révolutions : guerres, exode rural, modernisation des campagnes après 1945. À Berengeville, comme dans toute la Normandie, les décennies 1950-70 voient la mécanisation bouleverser les paysages et les rapports humains.
Mais la communauté villageoise, loin de disparaître, se réinvente. Les fêtes agricoles font leur retour à la fin du XX siècle, souvent pour soutenir des écoles ou des associations ; les marchés de producteurs redeviennent des lieux de rencontre et de convivialité.
Depuis les années 2000, la campagne n’est plus seulement un territoire « que l’on quitte » : beaucoup y reviennent, d’autres arrivent, en quête de sens et de qualité de vie. Ce mélange d’anciens et de nouveaux forge une identité actuelle, inventive et diverse.
Le patrimoine rural se transmet donc non plus seulement par la lignée directe, mais aussi par le partage, l’accueil, l’échange. C’est la promesse d’une identité toujours en mouvement.
Pour finir, quelques « perles » glanées au détour de conversations ou d’archives locales, qui disent à leur façon la richesse de cette vie rurale :
Pour qui prend le temps, la vie rurale apparaît comme une matrice : elle façonne, elle relie, elle inspire. Elle n'a jamais cessé d’évoluer, mais le désir de transmettre – gestes, paroles, accueil – reste le cœur battant du village.
Que vous soyez curieux de passage, nouvel arrivant ou enfant du pays, écoutez la campagne : à Berengeville, elle raconte encore tout bas son secret. Et chacun de vous, en vivant, en échangeant, en participant, écrit (sans s’en douter) le prochain chapitre de cette histoire plurielle et généreuse.
Vivre, découvrir et savourer la campagne normande