Un village normand à la croisée des terres

Avant de poser sac à dos et panier à cueillette dans nos sentiers, il faut comprendre un peu la carte et le relief de Berengeville-la-Campagne. Au cœur de l’Eure, à une douzaine de kilomètres d’Évreux et à moins d’une heure de Rouen, Berengeville-la-Campagne s’étend paresseusement sur un plateau du Pays d’Ouche, non loin des méandres de l’Iton. Le village n’est pas immense : sa superficie avoisine les 6,89 kilomètres carrés (source : INSEE), traversée par quelques routes départementales champêtres et de nombreux chemins ruraux.

  • Altitude moyenne : de 129 à 154 mètres
  • Paysages : alternance typique de champs ouverts, haies bocagères et poches boisées
  • Eau : pas de grande rivière, mais sources et ruisselets éparpillés, notamment l’Iton à quelques kilomètres à l’ouest

À vol d’oiseau, le patrimoine de Berengeville se repère à ses silhouettes d’églises anciennes et à ses fermes cachées derrière des talus couverts d’aubépine au printemps.

Bois, bocages et grandes cultures : un puzzle de paysages

Ce qui frappe d’abord, ici, c’est la diversité du paysage sur une si petite surface. La plaine céréalière s’étire comme un drap doré en été, ponctuée de massifs forestiers qui font le bonheur des promeneurs. Le bocage normand classique, avec ses talus, ses arbres résineux et parfois ses mares tapissées de lentilles d’eau, structure discrètement l’espace.

Les zones boisées de Berengeville

  • Le Bois de la Colline : principal massif aux abords nord du village, vestige des vastes forêts qui couvraient l’Eure au Moyen Âge.
  • Petits bois privés : nombreux, souvent le long des chemins, abritant chevreuils et un étonnant nombre de chouettes hulottes ; attention, accès parfois interdit, privilégiez les passages balisés.

Haies et vergers : l’âme champêtre

Les haies vives qui coupent les champs furent plantées dès le XVIIIe siècle pour protéger cultures et bétail du vent, mais aussi pour fournir du bois de chauffage. Elles forment aujourd’hui des corridors écologiques naturels, essentiels à la biodiversité. Les vergers de pommiers, bien qu’en régression, subsistent autour de certains clos-masures : ils sont le royaume des merles, rouges-gorges et grives musiciennes.

Le rôle des paysages agricoles

Berengeville-la-Campagne, comme beaucoup de villages du secteur, a vu ses structures agricoles évoluer.

  • Prédominance des céréales : blé tendre, orge, colza, lin
  • Présence de prairies, souvent en périphérie, héritage des élevages de bovins et de moutons
  • Quelques exploitations bio : légumes racines, maïs doux, produits locaux vendus en circuit court (voir la Ferme du Plateau)

Un paysage qui change de visage à chaque saison, entre mer de blé mûr en juillet, patchwork brun en octobre, et retour du vert tendre au printemps.

Au fil des sentiers : itinéraires et secrets de promenade

Marcher à Berengeville, c’est bien plus que suivre un balisage : c’est observer, sentir, parfois s’égarer pour mieux revenir. Plusieurs sentiers balisés ou non vous emmènent à la rencontre de la « nature ordinaire » qui, ici, est loin d’être banale.

  • Le circuit du Bois de la Colline : 5,2 km, facile, départ devant l’église du village, passages ombragés, vue sur les plaines céréalières.
  • La boucle des Clos Masures : 7 km, plus variée, permet d’approcher plusieurs fermes anciennes et de repérer les mares cachées, précieuses en période de sécheresse.
  • Le chemin des sources : 3,8 km, petite merveille pour les amoureux de botanique, notamment au printemps (anémones, primevères, violettes...)

Quelques conseils pratiques

  • Période idéale : printemps pour les fleurs et chants d’oiseaux, automne pour la lumière et les champignons.
  • Équipement : chaussures de marche, jumelles pour observer les rapaces, sac pour ramasser déchets rencontrés sur le chemin – la nature n’est pas une poubelle !
  • Respect : tenez-vous aux sentiers, ne cueillez pas les champignons sans permis, ne dérangez pas les riverains ni le bétail.

Rencontres sauvages : faune et flore à observer

Sous la couverture légère du bocage, Berengeville cache un vrai trésor pour les curieux de nature. Ici, chaque coin, chaque haie, chaque talus a sa surprise.

  • Mammifères : chevreuils, lapins de garenne, renards, parfois sangliers lors d’hivers rudes (mais restons prudents et observateurs de loin !).
  • Oiseaux : buses variables, faucons crécerelles, geais, pic verts… et le discret bruant jaune, typique des cultures normandes.
  • Amphibiens : grenouilles rousses dans les mares, tritons ponctués, crapauds communs en migration nocturne (attention aux soirs de pluie du printemps, pour la traversée des routes !)
  • Insectes : papillons azurés sur les prairies maigres, libellules autour des mares, coccinelles à profusion sur les haies en mai-juin.

Côté flore, les spécialistes s’amusent à reconnaître :

  • Les orchidées sauvages (Orchis bouffon notamment, source : INPN/MNHN)
  • Primevères, violettes, anémones sylvie, fougères aigle dans les bois les plus humides
  • Pomme sauvage et prunelliers bordant les talus, base de la confiture de nos anciens

La campagne ici a cela de généreux que même le promeneur distrait croisera sur son chemin le froissement d’une couleuvre à collier ou, plus rare, le vol fugace du loriot d’Europe.

L’eau si discrète : sources, mares et zones humides

Bien qu’il n’y ait pas de grand cours d’eau traversant le cœur du village, Berengeville-la-Campagne possède un petit réseau d’eaux claires, essentielles à la vie sauvage. On compte officiellement moins de 10 mares recensées sur le territoire (source : Agence de l’Eau Seine-Normandie), mais nombre de fossés humides et sources temporaires apparaissent après de gros orages.

  • Les mares : vestiges des anciens abreuvoirs, servent aujourd’hui de refuge à une ribambelle de crapauds, libellules et canards colverts de passage.
  • Les fossés : bordés de saules, ils dessinent le maillage hydrique du village, essentiel pour les pollinisateurs et les plantes hydrophiles.
  • La gestion de l’eau : sujet sensible, surtout lors des sécheresses récentes, qui entraînent parfois la disparition temporaire de certaines zones humides.

Promis, si vous savez rester silencieux, vous surprendrez peut-être le héron cendré qui vient profiter des grenouilles en toute discrétion.

Patrimoine naturel : témoins d’hier, atouts de demain

À Berengeville-la-Campagne, le patrimoine naturel se lit autant dans la géographie que dans les traditions encore vivantes. Les anciens racontent comment les enfants filaient entre les haies, s’essayaient à la pêche à l’épuisette dans les mares, ou cueillaient pommes et coings à la fin de l’été. Ce lien intime avec la terre est précieux et réclame attention aujourd’hui.

  • Haies labellisées “bocage remarquable” : programme régional de recensement et de sauvegarde des haies anciennes, piloté par la Chambre d’Agriculture de l’Eure.
  • Lieux de mémoire : vieux vergers communaux, fontaines, chemins creux classés dans l’Atlas de la Biodiversité Communale (source : Office français de la biodiversité).
  • Initiatives citoyennes : opérations de nettoyage des chemins, plantation participative de haies (rendez-vous parfois en novembre !), inventaires faune-flore menés par des bénévoles ou en lien avec le Conservatoire d’Espaces Naturels de Normandie.

Renouer avec ce patrimoine, c’est aussi comprendre que la sauvegarde de la biodiversité rurale passe par de petits gestes, à la portée de tous, au quotidien.

Comment explorer la nature de Berengeville, au rythme local ?

  • À pied : la marche reste le meilleur moyen de percevoir la richesse des micro-paysages et leurs habitants discrets. Le topo-guide “Sentiers et patrimoine en vallée d’Iton” (disponible à l’office de tourisme d’Évreux ou sur eure-tourisme.fr) propose des cartes à jour pour se perdre sans se tromper.
  • À vélo : pour les plus sportifs ! Prudence sur les routes partagées, mais les VTT s’en donnent à cœur joie sur les chemins agricoles.
  • En famille : prévoir des jeux d’observation (bingo nature, chasse au trésor de feuilles, collecte de cris d’oiseaux). Les enfants sont les meilleurs ambassadeurs d’un regard neuf !
  • Avec le bon équipement : bottes en hiver, jumelles, smartphone chargé (localisation GPS, application d’identification des chants d’oiseaux type “BirdNET” pour les curieux…)
  • Respect des restrictions : par temps de chasse, se renseigner sur les dates et secteurs (affichage mairie, panneaux rouges sur les chemins concernés).

Perspectives vertes : préserver et savourer le vivant

Si Berengeville-la-Campagne n’est pas un sanctuaire protégé, elle n’en reste pas moins l’un de ces villages où la nature offre tous les jours matière à émerveillement et simple bonheur d’être dehors. Les menaces existent : recul des haies, sécheresses, pollution des eaux, fragmentation des habitats. Mais, main dans la main, habitants, promeneurs et agriculteurs voient bien la richesse unique de ce coin de Normandie – et s’en occupent avec cœur.

Que vous soyez du coin ou de passage, que vous veniez respirer un grand bol de verdure au détour d’un sentier ou savourer la lumière dorée sur un champ tout juste moissonné, Berengeville continue d’écrire, à sa façon, le grand livre vivant de la campagne normande.

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